Les douleurs neuropathiques

Environ 20 millions de français sont atteints de douleurs chroniques, et 7% sont concernés par les douleurs neuropathiques. Ce sont des douleurs qualifiées de “rebelles”, car non soulagées par les antalgiques dits “classiques”. Mais comment définit-on réellement les douleurs neuropathiques? D’où viennent-elles? Quels sont les traitements qui existent et qu’en est-il des répercussions sur la vie de ceux qui en souffrent ? 

1- Qu'est ce que les douleurs neuropathiques ?

Les douleurs neuropathiques sont liées à une lésion du système nerveux central, composé du cerveau et de la moëlle épinière, ou des nerfs périphériques.
 

Elles sont fréquemment décrites comme des sensations de brûlure ou de décharges électriques, associées à des fourmillements ou des picotements. Elles sont aussi souvent associées à de l’allodynie, c'est-à-dire des douleurs provoquées par un stimulus habituellement indolore comme le toucher.


Le diagnostic des douleurs neuropathiques repose sur leur description, le contexte de survenue et l’examen clinique. Il est facilité par des échelles spécifiques. Parmi elles, la plus utilisée est l’échelle DN4 qui comporte seulement quatre questions et est remplie par la personne qui ressent les douleurs.

2- Quelles en sont les causes ?

Les origines et causes des douleurs neuropathiques sont diverses.


Elles peuvent persister à distance d’un accident ou de la guérison d’une maladie. Par exemple, elles sont fréquentes après un zona. Elles peuvent aussi survenir après un accident vasculaire cérébral ou un traumatisme médullaire : un an après un AVC, les douleurs neuropathiques touchent près d’une personne sur dix et c’est près de sept en cas de traumatisme médullaire.


Les douleurs neuropathiques peuvent aussi être iatrogènes, c’est-à-dire liées à un traitement médicamenteux ou chirurgical. Dans le cadre d’une amputation, 60 à 80% des personnes développent des douleurs neuropathiques, alors appelées “douleurs fantômes” et après une ablation du sein liée à un cancer (mastectomie), l’incidence est de 30 à 50%.


Enfin, les douleurs neuropathiques peuvent aussi survenir dans le cadre de certaines maladies chroniques. Le diabète peut notamment causer une polyneuropathie qui concerne surtout les jambes. Dans la sclérose en plaque la présence de douleurs d’origine neuropathique est de 20 et 30%.

3- Quels sont les retentissements ?

Les retentissements sur la vie quotidienne sont multiples. En effet, ce sont des douleurs chroniques souvent intenses et qui sont difficiles à soulager. Des études mettent en avant le fait que seule 1 personne sur 3 dit ressentir l’efficacité de son traitement.


D’après l’étude Pain in Europe Survey de 2006, 2 personnes sur 3 atteintes de douleurs chroniques se sentent handicapées dans leurs déplacements et l’accomplissement des actions du quotidien. Elles peuvent ainsi ressentir de fortes répercussions sur leur vie familiale et professionnelle : 40% des personnes souffrant de douleurs chroniques ont subi un changement, perte d’activité d’après le ministère de la santé.


Malgré les dispositifs d’aides qui existent, il en résulte un impact socio-économique fort notamment à cause du coût de certains traitements et aux arrêts maladies fréquents.

 

Psychologiquement, les douleurs neuropathiques entraînent régulièrement la survenue d’une dépression ou de d’anxiété chronique. Les troubles du sommeil sont également fréquents. Avec eux viennent la fatigue chronique qui peut limiter les activités et entraîner un isolement social.


De plus, les douleurs neuropathiques bien qu’handicapantes sont souvent invisibles. Ainsi, elles s’accompagnent parfois d’une incompréhension de l’entourage.

4- Quelle prise en charge ?

Les médicaments utilisés dans les douleurs mécaniques ou inflammatoires, comme le paracétamol ou les anti-inflammatoires, ne sont pas efficaces sur les douleurs neuropathiques.


Ainsi, le traitement des douleurs neuropathiques repose sur d’autres molécules qui sont notamment choisies en fonction de l’histoire médicale et des atteintes nerveuses. On privilégie les antidépresseurs, comme l'amitriptyline, ainsi que les antiépileptiques, comme la gabapentine. En effet, ces médicaments agissent sur les fibres nerveuses qui modulent la douleur.

En cas de douleurs périphériques et localisées, il est aussi possible d’avoir recours à des traitements tels que les patchs anesthésiants ou les injections sous-cutanées de toxine botulique.


Ces traitements médicamenteux sont aussi fréquemment associés à des traitements non médicamenteux comme la TENS (neuromodulation transcutanée électrique externe) : un stimulateur électrique relié à des électrodes autocollantes appliquées sur la peau et dont la stimulation électrique permet de bloquer la transmission du message douloureux.


En cas de douleurs rebelles aux traitements médicamenteux oraux et topiques, il est aussi possible d’avoir recours à la stimulation magnétique transcrânienne, à la neurostimulation médullaire ou aux perfusions de kétamine : des traitements proposés dans les services spécialisés dans la prise en charge de la douleur chronique.



Nos sources:

  • Bouhassira et al, Prevalence of chronic pain with neuropathic characteristics in the general population, 2008
  • Breivik et al, Survey of chronic pain in Europe, 2006
  • Centre National de Ressources Douleur (CNRD) et Société Française d'Etude et de Traitement de la Douleur (SFETD), La douleur en questions, 2018
  • Collège des Enseignants de Médecine de la Douleur (CEMD) pour la Formation en Soins Palliatifs (CNEFUSP), Douleurs, Soins palliatifs et accompagnement, 2021 
  • Danet et al, L'Etat de santé de la population en France, 2011
  • Raja et al, the revised International Association for the Study of Pain (IASP), definition of pain, 2020
  • Société Française d'Etude et de Traitement de la Douleur (SFETD), Livre Blanc de la douleur, 2017