"Je m'appelle Marine et j'ai toujours été une petite fille différente. Il y avait un tel décalage quant à ma façon de voir les choses. Je me sentais seule face à ce que je ressentais. Seule face à la nature humaine que je ne comprenais pas et mes envies de mourir.
A 12 ans, je me suis scarifiée. Un geste désespéré qui ne s'est jamais reproduit. A 16 ans, j'ai fait une dépression suite à une rupture amoureuse. J'ai perdu goût à la vie. Je ne souriais plus et me fichais de mourir. C'était la première fois que le masque tombait. Je ne parvenais plus à faire illusion... C'est à 21 ans que j'ai littéralement sombré. J'avais alors remis mon masque. J'allais à la fac, je travaillais en même temps, mais je mourrais au fond de moi. C'est cette année-là, en 2002, que j'ai été diagnostiquée dépressive par mon médecin traitant et mise sous antidépresseurs.
C'est seulement à 31 ans, après dix ans d'errance médicale, que j'ai été diagnostiquée cyclothymique : une forme de trouble bipolaire avec des cycles rapides. Cela signifie que j'ai des phases dépressives et des phases (hypo)maniaques qui s'alternent très rapidement ou se superposent par des états mixtes.
Mon trouble a de nombreuses répercussions dans mon quotidien. Ma cyclothymie a été reconnue comme un handicap et je suis, actuellement, en invalidité de type 2. Avec elle, je ne peux rien prévoir car je ne sais jamais si je vais être dynamique ou apathique. Je ne trouve pas ma place dans le monde professionnel car ma surproductivité en période d'hypomanie plus mon atypisme génèrent de l'animosité à mon égard. J'aimerais retrouver un emploi, mais je ne le pourrai que dans un poste qui prend en compte mes troubles et ma fatigabilité.
La bipolarité ne se guérit pas. On s'accomode. On apprend à vivre avec, même si c'est parfois insoutenable. Je suis suivie par une psychologue et une psychiatre et j'ai un traitement pour aider à la stabilisation de mes humeurs. Malgré tout, c'est parfois encore très dur car j'ai également un trouble anxieux généralisé et des troubles alimentaires qui influent sur mes humeurs (ou en résultent). De plus, il y a un fort sentiment de discrimination face à la peur de la différence et notamment des maladies psychiques. Il est parfois difficile pour l'autre de comprendre la maladie et tout ce qu'elle engage au quotidien chez le malade..."
- Marine, créatrice du compte instagram @le_comptoir_des_humeurs